La première ministre Élisabeth Borne dévoilera le 15 décembre le contenu du texte et s’apprête à affronter la rue.
Maintenant ou jamais. Sans dévier d’un pouce de la trajectoire fixée par le président de la République, Élisabeth Borne poursuit la mise sur orbite de la réforme des retraites.
Age de départ, pénibilité, régimes spéciaux, la première ministre, Elisabeth Borne, a dévoilé le jeudi 1er décembre dernier les contours de l’épineuse réforme des retraites, qui sera présentée aux partenaires sociaux à partir du 15 décembre. La première ministre a ainsi lancé le dernier cycle de concertation sur le financement du système avant de tenir un séminaire sur le sujet avec l’ensemble des ministres concernés.
Une main tendue à LR
Entre ces deux étapes, Élisabeth Borne a détaillé quelques pistes de travail sur le contenu de la réforme. Sans grande surprise par rapport au projet initial d’Emmanuel Macron de repousser l’âge de départ à 65 ans.
La première ministre en profite surtout pour tendre la main aux Républicains. « On doit pouvoir trouver un chemin », assure-t-elle après avoir entrouvert la porte à l’hypothèse d’un âge de départ finalement fixé à 64 ans en contrepartie d’un allongement de la durée de cotisation. Soit l’amendement voté par le Sénat où LR est majoritaire. « Évidemment, on sera à l’écoute des propositions des uns et des autres », promet Élisabeth Borne.
Sans le soutien de la droite, impossible de faire passer la réforme des retraites à l’Assemblée nationale sans sortir le 49-3. Ce que l’exécutif voudrait éviter pour conserver cet outil en vue des autres textes à venir dans l’Hémicycle, notamment sur l’immigration et les énergies renouvelables.
Difficile pourtant d’y voir clair sur l’attitude qu’adopteront les députés LR, du moins tant que le parti n’a pas désigné son nouveau patron, le 10 décembre prochain. C’est d’ailleurs cinq jours plus tard qu’Élisabeth Borne a prévu de dévoiler le contenu de la réforme.
Un timing précis
Mais si la première ministre se donne quelques marges de manœuvre pour tenter d’embarquer Les Républicains derrière la réforme, elle se montre en revanche intraitable sur le timing. « Nous tiendrons le calendrier », prévient-elle. Soit celui d’une réforme des retraites votée début 2023 pour une entrée en vigueur dès l’été.
« Il y a un intérêt politique à engager les choses maintenant, explique un ministre. La vraie année compliquée, c’est 2023, c’est pour ça qu’il faut la charger politiquement. L’année prochaine, il y aura les élections européennes ; la suivante, on sera en plein Jeux olympiques ; celle d’après, ce seront les municipales et la précampagne présidentielle. »
En clair, si 2023 n’est pas forcément le meilleur moment pour engager la réforme des retraites, avec l’inflation et la colère sociale sourde qui s’étend dans le pays, c’est en revanche le moins mauvais. Le moins susceptible en tout cas de voir des enjeux électoraux polluer les négociations.
Et puis, « il ne faut pas oublier que la matrice d’Emmanuel Macron, c’est l’anti-Hollande : faire les réformes difficiles en début de mandat pour en récolter les fruits à la fin », confie un proche du président.
Un «non» pour LFI
Même si le gouvernement parvient à trouver un accord sur la réforme des retraites avec LR pour éviter de recourir au 49-3, le pire lui est déjà promis. « Pour nous, c’est toujours non, comme 80% des Français, nous n’en voulons pas, et nous les ferons battre en retraite dans l’Hémicycle ou dans la rue », a promis la présidente du groupe LFI à l’Assemblée nationale, Mathilde Panot, sur RTL.
Le parti a déjà annoncé qu’il ferait « obstruction » à l’Assemblée nationale en multipliant les amendements. « La dernière fois, nous en avions fait 17.000 à 17, maintenant nous sommes 75, il se trouve même que, avec l’ensemble de la Nupes, nous sommes 151 », a menacé Mathilde Panot.
Son parti a d’ores et déjà prévu de participer à une manifestation programmée pour le 21 janvier prochain et se dit prêt à participer à toute autre initiative contre la réforme des retraites.
Des discussions chez les syndicats
C’est pour en discuter que les syndicats se réuniront lundi soir au siège de la FSU aux Lilas. « La CFDT, s’il y a report de l’âge légal de départ en retraite, aujourd’hui comme hier, comme avant-hier, elle s’opposera, et elle s’opposera par tous les moyens, et notamment on essaiera de s’y opposer de manière intersyndicale. C’est clair, net, précis », a mis en garde le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, en marge du lancement des Assises du travail à Paris.
Au sein de l’exécutif, si l’on s’attend à des grèves à la SNCF, c’est surtout la RATP que l’on surveille de près. L’arrivée de Jean Castex à la tête de l’entreprise s’est accompagnée de manifestations, signe d’un climat social très tendu.
« Il y a un droit de manifester, mais c’est important de dire clairement aux Français que cette réforme est nécessaire pour sauver notre système de retraites, assure Élisabeth Borne en mettant en garde. Si on ne fait pas cette réforme, c’est clairement annoncer aux retraités qu’ils auront un pouvoir d’achat affaibli. »
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